Stigmatisation religieuse au Bénin : Reckya Madougou tire sur la sonnette d’alarme.

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Dans une tribune publiée par le quotidien d’information Matin Libre et relayé sur son site internet ce mardi 28 février 2023, la présidente Reckya Madougou s’est prononcée sur une décision controversée du gouvernement de Patrice Talon. Il s’agit de la réforme qui vise à soumettre à un règlement les bruits dans les lieux de cultes. Une réforme qui s’apparente à une stigmatisation des communautés religieuses musulmanes au Bénin et qui pourrait constituer un terrain fertile au djihadisme. Voici l’analyse que nous faisons de cette réflexion de l’opposante à la gouvernance dictatoriale du Président de la République Patrice Talon depuis son lieu de détention.

Il s’agit du décret Nº 2022- 301 du 25 mai 2022 portant réglementations du bruit en République du Bénin, dont le gouvernement veut démarrer la mise en application. Si cela entre dans le cadre de la réforme initiée par les autorités béninoise pour mettre fin aux nuisances sonores causées aux populations, l’application de ce texte comme prévu, risque d’être vue comme une violation de la laïcité de l’État consacrée par la constitution. Car, le décret en question représente selon Reckya Madougou « une forme d’empiétement au libre exercice de la liberté de culte et de religion dont les religions musulmane et catholique sont les principales victimes ».
En effet, cette réforme va conduire à de graves restrictions dans la pratique des cultes et rites religieux. Cela implique par exemple la réduction des appels à la prière à partir des haut-parleurs, notamment chez les musulmans. Ce qui pourrait causer des frustrations et même provoquer des soulèvements. Aussi, cette nouvelle réglementation a de fortes chances d’être interprétée par les musulmans comme une persécution contre l’islam. Surtout que plusieurs événements font déjà naître ce sentiment dans le pays en général. « La politique répressive ciblée contre les Peulhs » dont des centaines sont incarcérés dans les prisons du Bénin, notamment à la prison civile de Missérété et sont en attente d’être jugés pour « terrorisme », en est une parfaite illustration. Reckya Madougou s’est même indignée que ce sujet épineux du ciblage des Peulhs ne fasse pas l’objet d’un débat public.

Quels liens avec le djihadisme ?

Le djihad se veut être une “guerre sainte” par définition. Et nos gouvernants sont bien conscients de tout ce dont est capable l’humain pour défendre et protéger sa religion. C’est d’ailleurs là que la tribune de Reckya Madougou trouve toute sa pertinence. Surtout lorsqu’elle attire notre attention sur la crainte « que la volonté des autorités à réformer à tout-va et tous azimuts, avec la fragile cohésion sociale actuelle, ne débouche sur la stigmatisation des communautés religieuses et ethniques ». Étant donné ce que traverse notre pays gravement menacé sur le plan sécuritaire, cela ne ferait qu’aggraver la montée en puissance du djihadisme.

Par ailleurs, lorsque nous jetons un coup d’œil sur l’histoire des pays voisins d’où le terrorisme a migré pour se répandre chez nous, on se rend aisément compte des dégâts que cette réforme des lieux de cultes peut créer. Dans la plupart de ces États, en effet, ce sont des décisions et actes de restrictions de la pratique de l’Islam qui ont poussé des gens à se rebeller contre leurs pays. Le gouvernement de Patrice Talon semble sombrer dans le même gouffre en initiant le décret 2022-301 du 25 mai 2022. L’un des principaux arguments qu’évoquent les groupes djihadistes dans les pays du Sahel, tels que le Niger et le Burkina Faso, est la persécution ciblée contre leur religion, l’Islam.
Pour finir, il faut remarquer que Reckya Madougou a fait preuve de clairvoyance et de courage en dépit de sa situation carcérale délétère, à travers son opinion qui rappelle que : « les appels sonores aux prières de nos mosquées et églises n’ont jamais été la cause des véritables pollutions sonores au Bénin. D’une part lesdits appels sonores religieux à la prière sont de courtes durées. D’autre part, ils sont de nature à rappeler, aux citoyens croyants des environs, les moments d’oraison, moments de lumière très utiles pour le salut de tous ». Interdire ces pratiques religieuses laissera beaucoup de stigmates aux communautés religieuses ciblées. Cela ne concourt malheureusement pas à la paix et à l’apaisement des tensions sociales

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