Russie : la froide vengeance de Vladimir Poutine ?

Russie : la froide vengeance de Vladimir Poutine ?

Evgueni Prigojine et Dmitri Outkine, les deux principaux responsables de la milice Wagner, se sont ajoutés mercredi soir à une longue liste de morts suspectes dans l’entourage du pouvoir russe.

Damien Koffi Konan

Difficile de ne pas voir la main du chef du Kremlin derrière le crash d’avion dans lequel Evgueni Prigojine et Dmitri Outkine ont officiellement trouvé la mort mercredi soir dans la région de Tver au nord de Moscou. Officiellement, parce que malgré les confirmations de l’agence fédérale russe de l’aviation, et du Kremlin, de nombreuses zones d’ombre persistent autour de leur mort. En plus du fait que personne d’autre que les autorités russes n’a vu leurs corps, beaucoup de théoriciens du complot se demandent comment tout le directoire des Wagner a pu se mettre dans le même jet privé et voler dans le ciel russe où ils devaient se douter qu’une cible avait été secrètement placé dans leur dos. Mais on n’est pas une théorie du complot près. 

Quoi qu’il en soit, le fantasque Evgueni Prigojine était devenu gênant pour « son ami » Poutine dont il a préparé pendant de longues années les repas, avant de prendre la tête de la société militaire privée Wagner, une milice que le Kremlin avait fait créer en 2014 pour sous-traiter la guerre du Dombass. Si son rôle a été décisif dans la guerre hybride de la Russie contre l’Occident en Ukraine, en Syrie et en Afrique, Evgueni Prigojine a commencé à sérieusement irriter le maître du Kremlin depuis qu’il a décidé de s’attaquer publiquement à la gestion de son ministre de la défense, Serguei Shoïgou et à celle du Chef d’État-Major Général de l’armée russe, le général Valeri Guerassimov. Mais pour beaucoup d’analystes, Prigojine et Outkine ont signé leur arrêt de mort quand le 23 juin 2023, ils ont lancé leur milice en direction de Moscou pour « changer de président », selon les propres déclarations du chef des Wagner.

Dès lors, plusieurs de spécialistes de la Russie ont estimé que les actes et les déclarations publics d’apaisement du président russe n’étaient qu’une façon de gagner du temps avant de « punir les auteurs de cette trahison ». Le chef des services secrets américains avait donné six (6) mois à Prigojine pour vivre, il n’en aura passé que deux (2). Vladimir Poutine a-t-il effectivement ordonné d’abattre l’Embraer de son ex-cuisinier ? « Il ne se passe pas grand-chose en Russie sans que Poutine n’y soit pour quelque chose », tranche Joe Biden, le président des Etats-Unis. D’ailleurs au moment du crash, Vladimir Poutine commémorait à Koursk l’anniversaire de la plus grande bataille de chars de l’histoire, où il saluait « la fidélité de nos soldats ». Difficile de ne pas y voir un tacle supplémentaire à ce qu’il considérait comme une trahison de la part de Prigojine.

Une série de morts mystérieuses

Depuis le début du conflit en Ukraine, les morts suspectes s’empilent au sein de l’élite russe. Hommes d’affaires, scientifiques, fonctionnaires ou militaires, le journal ukrainien Olrik décomptait une vingtaine de morts suspectes à la date du 31 juillet 2023. Parmi elles, celle d’Alexandre Tyulakov, membre du directoire du gazier russe Gazprom. Il avait été retrouvé mort le lendemain de l’invasion de l’Ukraine, dans son garage à Saint Petersbourg avec une lettre de suicide. Il sera suivi trois mois plus tard par son collègue Andrei Krukovsky, tombé d’une falaise à Sochi. Mais il y a aussi des responsables de la société Lukoil, comme Ravil Maganov qui était président de la société au moment où il « tombait » de la fenêtre de l’hôpital moscovite où il était soigné pour des « problèmes cardiaques ». Le 21 septembre 2022, Anatoly Guerashchenko, patron de l’agence de l’aviation civile russe « tombait » dans les escaliers de l’agence. Trois mois plus tard, en décembre 2022, c’est l’industriel Pavel Antov, le “roi de la saucisse”, qui est « tombé de la terrasse de son hôtel à New Dheli (Inde), alors qu’il fêtait ses 65 ans avec quelques amis au bord du Golfe du Bengale. Antov était également député de Russie Unie, le parti de Vladimir Poutine. Tous ces hommes avaient soit critiqué la guerre en Ukraine, soit ils étaient soupçonnés d’entraver l’opération militaire spéciale en Ukraine.

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