Non exécution répétée des décisions du Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire : voici ce qui adviendra au Bénin, selon le juge Roland Sètondji Adjovi, ex-membre du Gtda

juge Roland Sètondji Adjovi

Le Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire (Gtda) des Nations-Unies a rendu son avis sur l’arrestation, le procès et la détention du Professeur Joël Aïvo. Par Avis No. 21/2024 concernant Frédéric Joël Aïvo (Bénin), il a déclaré toutes ces étapes arbitraires. Il a même déclaré qu’« aucun procès n’aurait dû avoir lieu » et a demandé sa libération immédiate, avec des amendes.  Malheureusement, cette décision, d’ailleurs comme celle rendue, en novembre 2022, en faveur de l’ex-Garde des Sceaux, ex-Ministre de la Justice et de la Législation, Réckya Madougou, n’a ému guère le gouvernement et son Chef, Patrice Talon. Une attitude qui, à en croire Roland Sètondji Adjovi, ancien membre de cette juridiction internationale, n’est pas sans conséquence pour le Bénin.

Le non-respect des décisions du Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire (Gtda) des Nations-Unies, sans être alarmiste, semble devenir une insouciance pour le gouvernement de Patrice Talon. L’avis adopté le 25 mars 2024 et publié le 15 août 2024, n’a même pas suscité un quelconque commentaire de la part de l’exécutif. Idem pour le cas antérieur de l’ex-Garde des Sceaux, ex-Ministre de la Justice et de la Législation, Réckya Madougou. À aucun moment, le gouvernement n’a manifesté un infirme intérêt pour le contenu de ces deux décisions. Hors, selon Roland Sètondji Adjovi, ancien membre de cette juridiction, « l’accumulation de décisions peut créer un effet tel que l’Etat finit par les exécuter. Les circonstances politiques peuvent aussi influer sur la volonté politique de s’exécuter ou non. Attendons donc de voir. »

En effet, à en croire cet ancien juge de la Gtda, le non-respect des décisions du Groupe de Travail de l’Onu, porte préjudice au pays concerné. « Le Groupe de travail a un mandat pour trancher des litiges entre les États et les individus sur la privation de liberté. Au terme d’une procédure contradictoire, le Groupe de travail rend un avis qui doit déterminer si la détention est arbitraire ou non, en identifiant aussi les conséquences. Cette décision a une valeur juridique contraignante puisqu’elle est le résultat d’un mandat quasi-judiciaire et règle un différend, sans qu’il n’y ait de voie de recours. Mais cela n’implique pas que la décision soit forcément mise en œuvre car le système des Nations Unies ne dispose pas d’une force publique pour l’exécution. C’est d’ailleurs une critique qui peut être faite à la plupart des organes judiciaires et quasi-judiciaires du système international sauf ceux qui s’inscrivent dans un cadre communautaire ou la Cour internationale de justice dont les décisions peuvent être mises en œuvre par le Conseil de sécurité des Nations Unies », a-t-il expliqué dans une interview accordée à nos confrères de la presse en ligne ‘’Matin Libre’’.

Lorsqu’un pays s’oppose ou n’exécute pas ces décisions

À la question de savoir ce qu’adviendra au Bénin lorsqu’il s’oppose ou n’exécute pas les décisions du Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire, le juge Roland Sètondji Adjovi a été on ne peut plus clair : « Rien de façon formelle. Mais toute décision contre un État génère une obligation internationale à la charge de cet État et il y a mille façons politiques de s’assurer de l’exécution. Tout dépendra de la volonté des autres États qui peuvent exercer une pression sur l’État en cause pour s’exécuter. Parfois aussi, le juge national a eu le courage d’exiger l’exécution de la décision internationale. S’afficher comme ne respectant les droits de l’homme a toujours un coût, même s’il est différé dans le temps. Sans boule de crystal, je n’oserais pas m’avancer. »

En opinant sur la situation sociopolitique du Bénin de ces dernières années, il n’a pas caché son indignation. « Il y a une tendance dans le Bénin qui me paraît alarmante. L’État de droit, c’est notre seule garantie contre l’arbitraire, qu’on soit ou non du côté du pouvoir. Une accumulation de violations de droits de l’homme ne sert aucun pouvoir, ni à court terme, ni à long terme. Le seul appel qui peut être lancé, c’est que le Bénin reste du bon côté de l’histoire, celui des États qui respectent leurs obligations internationales, notamment vis-à-vis des individus », a-t-il déclaré.

Le juge Roland Sètondji Adjovi a profondément regretté l’absence du Bénin au cours de l’examen de ce dossier. Selon lui, le Bénin aurait gagné à répondre dans les délais pour un débat contradictoire qui lui aurait profité. « Pourquoi a-t-il failli ? Qui sont les responsables de cette faillite de l’État ? Vont-ils être sanctionnés ? Le peuple béninois a le droit de savoir… », s’est-il exclamé.

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