Jean-Baptiste Élias déconstruit les arguments en faveur de la révision du code électoral

Jean-Baptiste Élias déconstruit les arguments en faveur de la révision du code électoral

Au Bénin, une semaine après la promulgation du nouveau code électoral par le président de la république, le président du Fonac est sorti de son silence. Jean-Baptiste Élias a saisi l’occasion d’une interview sur les ondes de Krystal News détruire point par point les arguments avancés par la mouvance présidentielle pour justifier ce que lui qualifie de « code de l’exclusion ».

Légaliste, le président du Fonac a d’abord pris acte de la décision de la cour constitutionnelle de déclarer cette réforme conforme à la constitution, avant de s’attaquer au fond. Pour Jean-Baptiste Élias, la réforme adoptée le 5 mars dernier n’est nullement inclusive, contrairement aux allégations des partisans du pouvoir. « Au niveau du Fonac, on a fait le point. Ce n’est pas vrai, pas du tout », insiste-t-il avant de commencer à énoncer un chapelet d’incohérences dans le texte.

Le parrainage

Au sujet du parrainage, le président du Fonac souligne trois anomalies dans le texte qui contredisent les allégations du pouvoir. D’abord la réforme limite insidieusement le nombre de candidats potentiels à l’élection présidentielle : « Il est dit, pointe l’activiste, que pour participer, il faut réunir désormais 15% des parrains. Comme parrains aujourd’hui, nous avons 186, c’est-à-dire 109 plus 77. 15% ça fait 28 parrains. Divisez 186 par 28, vous trouverez 05. Les mêmes qui parlent savent et répètent partout qu’il y a 15 partis dans le pays. Ça veut dire quoi ? Si pour parrainer, il faut 28, le maximum de parrains qu’on peut faire c’est 05 ou 06. Mais ils sont quinze. Prenons le maximum 06. Si on dit c’est seulement six qu’on peut parrainer, normalement avec la volonté et l’indépendance des parrains qui ne peuvent parrainer que six, sur les quinze il reste neuf. Les neuf là sont exclus ou pas ? On ne peut pas parler d’inclusivité, ce n’est pas vrai ! Les neuf sont de toute façon exclus d’une manière ou d’une autre. Je reconnais que la loi est toujours exclusive. S’ils continuent de dire ça ce n’est pas bien. »

Le président du Fonac enfonce le clou concernant le parrainage : « Deuxième élément, on leur dit “vous ne devez parrainer que les gens de votre parti ou à défaut, des gens proposés par votre parti”. Il y a combien de partis qui ont cette marge-là ? Ils ne sont que trois. Autrement dit, les trois ne peuvent parrainer plus que 03 personnes car il est dit que “vous devez parrainer les gens de votre parti”. Ça veut dire qu’il reste 12 (partis politiques, ndlr). Les 12 sont exclus aussi. On ne peut pas parler d’inclusivité, ce n’est pas vrai. Enfin, monsieur Élias dénonce le cynisme derrière les conditions de parrainage des adversaires : « vous devez parrainer seulement ceux qui sont de votre parti ou ceux qui sont proposés par votre parti ou ceux qui sont dans une alliance de partis avec votre parti. Ça fait toujours trois, pas plus. Ce qu’il faut comprendre, vous êtes un candidat qui voulez aller à une compétition, vous avez envie de gagner, on vous dit : “oui mais vous voulez aller à la compétition, mais on ne veut pas que vous y alliez seul. Je vous donne l’opportunité, vous, de choisir votre compétiteur.” Vous allez choisir un compétiteur qui va vous battre ? Ce n’est pas vrai ! Vous choisirez un compétiteur qui est moins que vous dont vous êtes sûr qu’il ne pourra pas vous battre. Autrement dit, il y a toujours l’exclusion. L’exclusion est toujours au rendez-vous. »

Renforcement des partis

Jean-Baptiste Élias s’est aussi attaqué aux contre-vérités importées d’ailleurs pour défendre la mission de renforcement des partis politiques béninois, assignée au nouveau code électoral. On a en effet beaucoup entendu qu’on voulait faire comme les États-Unis, comme le Ghana, ou comme le Nigéria. « Là aussi, les gens n’ont pas dit la vérité à la population. Allons-y ! Au Ghana, au Nigéria, aux Etats-Unis, il n’y a pas le parrainage donc ce n’est pas la même chose. On ne peut pas dire que nous voulons faire comme ces pays-là, ce n’est pas vrai. Ils n’ont pas dit à la population que là-bas il n’y a pas le parrainage, et ici le parrainage exclut les gens. ».

Monsieur Élias souligne qu’aussi bien au Ghana, au Nigéria qu’aux Etats-Unis, on peut avoir des candidats libres, des candidats indépendants. La dernière élection qui a eu lieu au Nigéria, il y a 18 candidats. La dernière élection présidentielle qu’il y a eu au Ghana, il y avait 11 candidats. La dernière élection qui a eu lieu aux États-Unis, tenez-vous bien, il y a eu 1225 candidats. Les gens ne sont pas au courant parce que les deux partis forts, à savoir, les partis Républicain et Démocrate, ils ont l’argent nécessaire pour communiquer si bien qu’on n’entend pas les autres. Et au finish, il y a eu 09 candidats, des indépendants, des écologistes, des ceci, des cela et c’est les deux qui avaient les moyens financiers forts qu’on a retrouvés dans le lot. Donc, ne dites pas que nous voulons faire comme les États-Unis, on veut faire comme le Ghana, on veut faire comme le Nigéria. Je continue : au Ghana, vous savez combien il faut comme caution pour un député ? Le député qui est candidat, sa caution c’est 500 cedis. Autrement dit, le montant de la caution pour le Ghana pour être député ne fait même pas 50 000 FCFA. Ça fait combien ici ? 03 millions pour les dernières élections. Il paraît que maintenant on a diminué un peu. Ça fera 1 million 500 mille. Les pays qu’ils ont cités-là n’ont pas mis trois candidats. Et ces pays-là sont bien en avance sur le Bénin. »

On le voit, la promulgation du nouveau code électoral n’a pas mis fin au débat.

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