Le célèbre imam malien revenait d’un voyage en Mauritanie lorsqu’il est interpellé à l’aéroport de Bamako ce jeudi 22 juin 2023. Il a aussitôt été écouté par les autorités lors d’un interrogatoire à l’issue duquel le passeport diplomatique qu’il détenait lui a été arraché.
À Bamako, les autorités ne se sont pas encore prononcées officiellement sur les raisons du retrait du passeport de l’Imam. Un membre des services de sécurité cité par l’agence France presse évoque des « erreurs techniques » dans le document de voyage. Au sein de la classe politique et la société civile, cette mesure est interprétée comme une persécution contre la personne de Mahmoud Dicko qui a pris ses distances d’avec les militaires au pouvoir. « C’est la énième fois qu’il subit ce genre d’intervention de la part des forces de l’ordre (…) nous demandons aux autorités de la transition de faire la lumière sur cette affaire », a laissé entendre Youssouf Daba Diawara de la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko sur DW Afrique.
Mahmoud Dicko est le leader religieux musulman instigateur des manifestations populaires qui ont conduit à la chute de l’ancien président Ibrahim Boubacar Kéïta. Il a soutenu la junte militaire qui avait pris le pouvoir avec à sa tête le colonel Assimi Goïta. Depuis quelques mois, Mahmoud Dicko est entré en disgrâce avec les autorités du pays. Il a notamment contesté le projet de nouvelle constitution soumis au référendum le dimanche 18 juin et avait appelé les Maliens à ne pas voter en faveur du texte. Ce qui augure de l’atmosphère très tendue entre le leader religieux et les militaires au pouvoir. Avec sa brève interpellation jeudi dernier et le retrait de son passeport diplomatique, l’inquiétude gagne déjà les cœurs. C’est le cas de l’islamologue Al Hassan Bah du centre islamique de formation et de documentation qui s’exprime en ces termes : « Nous regrettons beaucoup que les choses aient pris cette tournure créant ainsi une situation d’inconfortabilité pour notre pays. Cheikh Mahmoud Dicko a une certaine personnalité à plusieurs dimensions. Sa personnalité a une dimension politique, mais surtout une dimension religieuse. Ce qui fait que selon lui-même, il doit mener une lutte qui lui semble être la vraie et appropriée en ce moment. Avec le retrait de son passeport, nous pourrions être témoins des mouvements et des agissements qui soutiennent ses idéaux, mais aussi sa personnalité qui a atteint, dans un certain sens, l’apogée ».
Dans le rang des soutiens et partisans de la junte au pouvoir, on estime qu’il n’y a pas encore péril en la demeure. Le vice-président de la Forsat civile, Younouss Soumaré ne trouve aucun gène en ce que le passeport de l’Imam ait été retiré. « Le retrait du passeport diplomatique de l’imam Mahmoud Dicko est tout à fait normal. Parce que c’est suite à ses agissements contre la transition. Je trouve que c’est un acte salutaire. Quitte à l’imam maintenant de rassembler les Maliens autour du Mali. Comme on le dit chez nous, qui cherche trouve. Ce qui est sûr, l’Etat ne meurt pas », s’est-il réjoui au micro de la DW Afrique.
L’imam Mahmoud Dicko a été relâché par les autorités jeudi soir après près de deux heures d’interrogatoire. Il a ensuite quitté l’aéroport pour se rendre à son domicile de Bamako.
