Les détenus des 11 prisons du Bénin éprouvent beaucoup de difficultés à recevoir des soins appropriés quand ils sont malades. Constat fait depuis des lustres, Amnesty International le confirme, des témoignages à l’appui, dans un communiqué de presse ce jeudi 1er août 2024.
Alors que les personnes incarcérées ont également des droits inaliénables dont l’accès à des soins de qualité, dans les prisons du Bénin, beaucoup de détenus ont confié aux enquêteurs d’Amnesty International qu’ils ont une ou plusieurs fois vécu une discrimination en la matière. « J’ai fait une crise d’asthme mais le chef de cellule a refusé d’ouvrir la porte », leur a confié un détenu de la prison civile de Missérété.
Le rapport révèle également qu’à la prison civile d’Abomey-Calavi, une détenue a déclaré : « J’ai un problème d’hémorroïdes, mais l’infirmière m’a dit qu’elle ne recevait plus de patients avec des hémorroïdes ». Dans la même prison, on leur exigerait un mandat de dépôt avant d’avoir accès à l’infirmerie, alors qu’il est difficile d’obtenir ce document. « J’ai demandé mon mandat au greffe il y a une semaine, mais je ne l’ai toujours pas reçu », a déclaré un autre détenu.
Dans ces conditions, beaucoup de drames se produisent. C’est le cas d’un jeune homme de 22 ans qui, faisant une crise d’épilepsie, n’aurait pas été secouru à temps. Les gardiens seraient allés le voir des heures plus tard. « Le lendemain, on nous a dit qu’il était mort. Il lui restait deux mois de détention avant d’être libéré », se désolent ses codétenus.
Des simulacres d’infirmeries
Le rapport démontre également que les infirmeries des prisons du pays sont sous-équipées, avec un manque criard de personnel. On lit dans le document rendu public : « Les prisons manquent de personnel médical. Aucune des prisons visitées ne dispose de médecins d’Etat en permanence. Les infirmeries, gérées par deux ou trois infirmiers ou infirmières, sont assistées deux fois par semaine par des médecins déployés par l’ONG Bénin Excellence. A Natitingou, l’infirmerie reçoit 400 à 600 détenu.e.s par mois, selon un infirmier. Les prisons de Missérété, Parakou et Abomey comptent respectivement trois infirmières pour 3 742 détenu.e.s, trois infirmiers pour 1 491 détenu.e.s et deux infirmiers pour 2 468 détenu.e.s. »
A Abomey-Calavi, une infirmière a avoué être à bout de force face à la multitude de patients dont elle a la charge. Aussi a-t-elle déclaré : « Vous êtes infirmière et on vous place le sort de 2 000 personnes entre les mains. Ce n’est pas normal. » Des médicaments seraient refusés aux détenus. Une détenue de la prison d’Abomey aurait même déclaré « qu’en juin 2023, elle avait reçu des médicaments périmés depuis décembre 2022 ». « On a souvent des ordonnances, mais rarement des médicaments. », aurait révélé un détenu de la prison de Ouidah
Amnesty International vient ainsi de mettre un coup de pied dans la fourmilière, révélant ou confirmant la précarité des soins administrés aux personnes incarcérées au Bénin et le refus des administrations pénitentiaires d’autoriser certains prisonniers à recevoir les soins qui leur sont prescrits et qu’exigent leurs pathologies. A présent, tous les regards sont tournés vers l’Agence Pénitentiaire du Bénin et le Ministère de la Justice. Une réaction de François Hounkpè et du Garde des Sceaux Yvon Détchénou est sans doute attendue.