Rien ne l‘arrête

Rien ne l‘arrête

Juriste et enseignante chercheure, Dandi Gnamou n’a jamais laissé personne indifférent. Sa carrière fulgurante a été construite sur une succession de raccourcis qui ont failli la rattraper à l’occasion de sa nomination comme juge à la cour constitutionnelle.

(Olofofo n°4 du 05.07.2023)

Dandi Gnamou n’a jamais été inquiète. La contestation de sa nomination à la cour constitutionnelle n’était qu’un épiphénomène vite réglé par une juridiction entièrement sous le contrôle du régime qui l’a désignée. De fait, la décision rendue par la juridiction le jeudi 29 juin 2023 n’a été qu’une formalité. Attaquée pour sa moralité douteuse et sa probité en pointillé suite à sa condamnation par le conseil des ministres du Cames pour fraude et usurpation de grade, l’enseignante en droit public aurait pu sérieusement risquer sa mise à l’écart si la cour constitutionnelle n’avait pas décidé de s’écarter de sa tradition en la matière. Mais les temps ont bien changé.

Ses adversaires ne s’attaquaient pas à ses compétences professionnelles, mais plutôt à sa capacité à siéger au sein d’une institution qui requière une rigueur morale à toute épreuve. Et Dandi Gnamou ne semble avoir que faire de la morale et des règles de probité. En 2019, celle qui était encore agrégée de droit public se faisait épingler par le comité d’éthique et de déontologie du Cames pour avoir falsifié son dossier d’admission au grade de professeur titulaire et pour avoir usurpé un grade auquel on n’a accès qu’après avoir encadré jusqu’à leur soutenance, un certain nombre de thèses. Dandi Gnamou n’en avait encadré aucune.

Les chemins courts, madame Gnamou en a compilés durant son parcours académique. Après son diplôme obtenu à l’université d’Abomey-Calavi, la jeune juriste s’était envolée pour la France où elle tomba « follement amoureuse » de monsieur Petauton qui le lui rend bien. Les deux convolent rapidement en justes noces et monsieur Petauton s’investira personnellement, intellectuellement, matériellement et financièrement dans la préparation de la thèse de son épouse à l’université Paris XI. Sa thèse de doctorat en droit public en poche dès 2006 sous la direction du professeur Daniel Dormoy, la jeune docteur décide de retourner servir son pays. Elle intègrera rapidement les rangs des enseignants de la faculté des sciences juridiques de l’université d’Abomey-Calavi. Quelques années plus tard, Dandi Gnamou Peteuton divorcera et redeviendra Dandi Gnamou tout court.

L’épisode Peteuton terminé, la jeune femme se rapprochera du professeur Victor Prudent Topanou, qui était à l’époque l’une des figures les plus influentes de la faculté de droit d’Abomey-Calavi. Les deux enseignants emménageront même ensemble pendant quelques années avant que la jeune dame ne reprenne sa liberté. Désormais elle a d’autres ambitions que le professeur Topanou en perte d’influence ne pouvait plus lui assurer.

Entretemps, elle était devenue agrégée des facultés de droit et visait désormais le grade prestigieux de professeur titulaire de droit public. Seulement un gros obstacle se dressait sur son chemin, elle devait justifier d’un certain nombre de thèses encadrées et soutenues au sein de son école doctorale. Condition qu’elle ne remplissait pas. C’est à l’université de Lomé qu’elle trouvera la planche de salut. Un de ses collègues dont elle s’était entretemps intimement rapprochée lui fournira la thèse qu’il lui manquait. Mais c’était sans compter avec la vigilance du comité d’éthique et de déontologie du Cames. L’instance la fera condamner en mai 2019 à Cotonou, pour fraude.

Cette condamnation n’empêchera pourtant pas sa nomination au secrétariat général de la cour suprême en 2020, puis conseillère à la Cour des Comptes où elle présidait la Chambre de contrôle des Comptes des entreprises publiques jusqu’à sa désignation à la Cour Constitutionnelle en mai dernier. En 2017 et 2018, elle avait soutenu et défendu les deux projets de révision constitutionnelle qui avaient été retoqués par l’assemblée nationale

Rien, ni personne ne semble arrêter la marche inexorable de madame Dandi Gnamou.

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