Seuls habiletés à parrainer les candidats à l’élection présidentielle de 2026, les députés de la 9e législature sont au centre de toutes les convoitises. Le président Talon va tenter de les persuader de l’aider à les affaiblir.
Par Julien Coovi
Le président de la république est déterminé à modifier le cadre juridique de la tenue des élections générales de 2026. Il a entamé pour cela de grandes manœuvres politiques depuis le mois de novembre dernier. La prochaine étape, c’est la série de rencontres qui démarre ce jour lundi 22 janvier avec les groupes parlementaires. Le Président de la République recevra d’abord les députés de l’opposition, ensuite ceux du Bloc Républicain et enfin les élus de l’union Progressiste le Renouveau.
Système de parrainage
Dans sa version actuelle, le code électoral dispose que ce sont les députés de la législature en cours qui sont habiletés à parrainer les candidats à l’élection présidentielle d’avril 2026 à laquelle le président Talon n’est plus éligible. Dans sa décision du 4 janvier dernier, la cour constitutionnelle a précisé que même si les députés de la 10e législature seront élus avant le prochain président de la république, ils n’auraient pas encore été installés avant la date de clôture des dossiers de candidature pour la présidentielle. C’est pour cette raison, précise la cour constitutionnelle, que les fiches de parrainage doivent être remises aux députés de la législature en cours.
Opération anti-Boko
Une situation qui fournit un moyen de pression considérable aux députés actuels. Ils peuvent utiliser leur pouvoir de parrainage pour faire chanter leurs partis politiques respectifs et se protéger contre une éventuelle non reconduction de leur mandat. Plus concrètement, les députés pourraient menacer de ne pas parrainer le candidat de leur parti ou de vendre leur fiche de parrainage au plus offrant si leur mandat n’est pas reconduit. Un problème sérieux pour le président de la république et pour ses stratèges qui se sont visiblement laissés surprendre par une variable qu’ils n’avaient pas anticipée : une rébellion interne. Le système de parrainage tel que conçu l’avait été en effet pour contrer les menaces venant de l’opposition, jamais contre des frondeurs internes au système et qui, comme Olivier Boko, sont capables de disputer une partie de la machine au président de la république. Des sources sérieuses au sein de la mouvance présidentielle nous assurent qu’à la date d’aujourd’hui, entre 20 et 30 députés du BR et de l’UP-R encouragés par monsieur Olivier Boko, seraient prêts à défier le système dont ils sont le produit. Patrice Talon qui est au courant des fissures que son “ami” Olivier Boko a créée au sein de sa majorité, a besoin de purger son groupe de ces élus récalcitrants et de se mettre une fois pour toutes à l’abris de ce genre de surprise.
Mission impossible ?
La finalité de l’initiative de la modification du code électoral, c’est de priver les députés de ce levier de négociation en conditionnant la validité des fiches de parrainage à leur cosignature par les chefs de parti. Et le tour sera joué. La manœuvre serait illégale et anticonstitutionnelle, puisque non seulement le mandat législatif n’est pas un mandat impératif, mais en plus, même si les chefs de parti étaient des élus (aucun d’eux ne l’est aujourd’hui) la réforme ferait deux les seuls véritables parrains des candidats à l’élection présidentielle. Ce qui ne serait pas possible sans une nouvelle modification de la constitution.
Quels sont les arguments dont dispose le président Talon pour convaincre les députés de l’aider à les affaiblir ? Sur le papier, il dispose d’une majorité confortable à l’assemblée nationale pour modifier le code électoral, et peut compter sur la cour constitutionnelle pour le contrôle de constitutionnalité. Mais combien dans son propre camp sont prêts à la date d’aujourd’hui à renoncer à ce pouvoir considérable qu’ils ont sur lui pour la première fois depuis son arrivée au pouvoir ? «Pour la première fois depuis plusieurs années tout devient possible à l’assemblée nationale », commente un analyste politique.