Le 21 octobre 2024, la Cour de Répression des Infractions Économiques et du Terrorisme (CRIET) a examiné le cas de trois détenus de la prison civile d’Akpro-Missrété, accusés d’avoir fourni des informations au journaliste Comlan Hugues Sossoukpè. Ces accusations surviennent après que ce dernier a révélé, en septembre 2023, des conditions sanitaires déplorables au sein de l’établissement pénitentiaire d’Akpro-Missérété. Des informations qui soulignaient notamment les « odeurs insoutenables des latrines » et alertaient sur l’état de santé critique de feu Radji Latif, un détenu décédé le 1er juillet 2024.
Par Bruno Charles
Les prévenus sont poursuivis pour complicité de « harcèlement par communication électronique » et « publication de fausses nouvelles ». Lors de l’audience, ils ont plaidé « non coupable », affirmant que leur intention était de dénoncer des dysfonctionnements graves, tels que les conditions sanitaires alarmantes et la détérioration de la santé de Radji Latif. Ils ont précisé que leur démarche résultait du silence du régisseur face à ces problèmes.
Au cours du procès, le juge Célestin Kponon a tenté de dissuader l’un des détenus en affirmant que le journaliste Sossoukpè avait fait des allégations à son encontre, suggérant qu’il serait en exil à l’étranger. Dans ses explications, il a souligné que les actions des trois détenus semblent louables, mais il restait à se demander s’ils disposent réellement des ressources nécessaires pour mener à bien leur initiative. Le sarcasme transparaissait dans ses propos, relevant une approche paradoxale pour un juge.
Le lendemain du procès, Comlan Hugues Sossoukpè a publié un communiqué sur les réseaux sociaux, pour dénoncer ce qu’il qualifie de « harcèlement judiciaire » à l’encontre des détenus. Dans ce message, il souligne qu’il ne connaît pas les prévenus, mais affirme que leur poursuite vise à intimider d’éventuels informateurs et à dissuader les victimes d’abus de dénoncer les violations des droits.
Sossoukpè met en lumière une manœuvre orchestrée par les autorités béninoises pour étouffer toute critique et maintenir une chape de plomb sur la population, afin de poursuivre leurs abus dans l’anonymat. Il appelle à la libération immédiate des trois détenus, qualifiant leur procès d’injuste.
Ce dossier met en exergue les tensions entre la lutte pour les droits humains et la répression des voix critiques au Bénin. Ce sont les défis auxquels sont confrontés ceux qui osent dénoncer les abus au sein du système pénitentiaire et au-delà.
La décision de la cour est attendue pour le 4 novembre 2024, où le procureur présentera ses réquisitions et les avocats des prévenus effectueront leurs plaidoiries.