La Charte des partis politiques est l’une des réformes phares opérées par Patrice Talon à la tête du Bénin. Estimé à près de 300 en 2017, le nombre des partis politiques est passé à 18, en quelques années. Une chute qui illustre la réussite de la réforme. Mais on est porté à se demander ce qu’il en sera une fois que Patrice Talon ne sera plus aux commandes.
C’est l’une des réformes les plus contestées et qui a nourri des divisions au sein de la classe politique pendant longtemps. Mais en venant au pouvoir en 2016, Patrice Talon avait jugé nécessaire de réorganiser l’environnement politique du pays. Il ne conçoit pas l’existence d’autant de partis politiques au Bénin. Pour lui, il fallait prendre des mesures idoines pour réduire considérablement leur nombre. « Ce sera mieux pour la gouvernance, mieux pour l’action gouvernementale » avait-il confié à Jeune Afrique.
Le paysage politique, tel qu’il était, ne lui facilitait pas le déroulement de son programme de gouvernance. Cependant, en dépit de la réussite que connaît sa mise en œuvre, la réforme du système partisan est un véritable choc, tant pour la classe politique que pour les populations. Cette nouvelle mesure a été à la base de l’exclusion de plusieurs partis politiques lors de certaines élections (celles de 2019, 2020 et 2021) et a conduit à des affrontements meurtriers.
Pour convaincre de la nécessité d’aller vers cette réforme, voici l’explication que donne le député Orden Alladatin dans le Nº 3122-Mars 2023 du magazine Jeune Afrique : « Le pays était devenu ingouvernable. Aucun président de la République ne pouvait tenir un cap cohérent. Il fallait discuter avec chaque chapelle politique, la démocratie béninoise était une démocratie de façade, une démocratie malade ».
La réforme ayant abouti, puisque toutes les trois dernières élections ont été organisées sur la base de la nouvelle charte des partis politiques, un autre défi se pose à Patrice Talon désormais. Il s’agit de comment assurer la survie de cette réforme afin qu’elle ne soit pas balayée à la fin de son second (et dernier mandat constitutionnel. NDLR) et qu’on retourne à l’ancien système.
Sur la question, plusieurs sources proches du Chef de l’État avouent que c’est compliqué. « Il y a une vraie menace, et la question est ouvertement abordée par le président. Il cherche la formule pour faire en sorte de verrouiller cette réforme, mais il ne l’a pas encore trouvée », explique un ancien ministre dans cette parution de Jeune Afrique.
Le véritable problème pourrait venir même du camp présidentiel puisque des conflits naissent déjà entre les deux partis qui représentent la mouvance au parlement, en l’occurrence le Bloc Républicain (BR) et l’Union Progressiste le Renouveau (UPR).
À en croire l’entourage du président, ce dernier leur aurait même rappelé de « ne pas se tromper d’adversaire », sans pour autant insister qu’ils fusionnent afin de mieux avancer vers l’idéal du Bipartisme que préconise la réforme. Par ailleurs, bon nombre de Béninois pointent cette réforme du doigt pour justifier l’absence des formations politiques de l’opposition au sein du parlement précédent.
Selon Jeune Afrique, Patrice Talon est également conscient que l’entrée du parti Les Démocrates à l’Assemblée Nationale, avec 28 sièges obtenus à l’issue des dernières législatives, ne suffira pas pour faire accepter sa réforme à l’ensemble de la classe politique.
En attendant de trouver la bonne formule pour sécuriser la refonte du système partisan, il faudrait reconnaître que le Président béninois aura quand même réussi à signer l’arrêt de mort des micros-partis, les contraignant à disparaître ou à intégrer les grands blocs.