Le Bénin vient d’obtenir un financement de 200 millions de dollars (120 milliards de FCFA) de la part de l’Association internationale de développement (IDA), pour transformer le système de transport urbain dans la région du Grand Nokoué. L’ambition est claire : créer un réseau intégré de bus et de bateaux pour désengorger les axes surchargés et offrir des alternatives efficaces aux 270 000 usagers quotidiens actuels, voire 360 000 à terme. Mais plusieurs questions restent en suspens.
Le projet prévoit de professionnaliser le secteur informel, notamment les taxis-motos ‘’zémidjans’’ et les minibus “Tokpa-Tokpa”. Or, ces modes de transport dominent aujourd’hui les rues de Cotonou, Abomey-Calavi ou Porto-Novo. Comment les intégrer sans les marginaliser ? L’État prévoit-il une réduction progressive de leur nombre ou une réaffectation à des circuits spécifiques, comme cela se fait dans d’autres pays de la sous-région ? Le flou demeure.
La promesse d’une meilleure couverture sociale pour 65 000 ‘’zémidjans’’ est encourageante, mais les modalités de leur implication réelle dans le nouveau système restent à définir. Seront-ils reconvertis en chauffeurs de bus ou intégrés dans des réseaux de transport public secondaire ? Et surtout, comment faire cohabiter ce nouveau dispositif avec un trafic déjà saturé ?
Un réseau intégré, mais à quel prix ?
Sur le plan financier, l’espoir d’un tarif plus accessible pour les usagers revient dans les débats. Plusieurs projets passés ont suscité des attentes en matière de réduction des coûts, sans succès notable. Ce nouveau système de transport offrira-t-il un service abordable pour les populations à faible revenu ? L’enjeu est de taille dans un contexte où les dépenses liées aux transports pèsent lourdement sur les ménages.
L’introduction de bus modernes et de bateaux pourrait être perçue comme une modernisation réservée à une élite, si aucun mécanisme de tarification sociale n’est mis en place. Or, sans l’adhésion massive des populations, les infrastructures risquent de rester sous-exploitées.
Enjeux logistiques et environnementaux
Le recours à l’e-mobilité et la création de 17 000 emplois sont des avancées notables, mais la réussite du projet dépendra aussi de la gestion des flux et de la coordination entre les différents modes de transport. Ajoute-t-on des bus sans réorganiser le trafic actuel ? Ou planifie-t-on des itinéraires réservés, des couloirs dédiés, des pôles d’échange multimodaux ? Pour l’instant, le schéma logistique complet n’a pas encore été dévoilé.
En résumé, le financement est ambitieux, les intentions louables, mais les réponses concrètes aux réalités locales manquent encore de clarté. La réussite du projet tiendra autant à la qualité des infrastructures qu’à la capacité de l’État à articuler réforme sociale, planification urbaine et équité tarifaire. La promesse d’un changement de paradigme est là, mais le peuple attend des preuves tangibles.