L’éditorial d’Arimi Choubadé
La bourse du travail de Cotonou interdite aux travailleurs ; des responsables syndicaux gardés dans les locaux de la police durant toute la journée du 27 avril 2024. Cela se passe chez le chantre de la restauration de la démocratie au Niger. 34 ans après la conférence nationale, le régime Talon n’a rien trouvé de mieux que cette troublante publicité sur le Bénin, siège du printemps noir en 1990. Pour une terre sans or ni diamant ni pétrole ni fer, une image de totalitarisme voire de despotisme est une véritable tragédie. Le spectacle du siège des travailleurs assiégés toute une journée, ses voies d’accès complètement bouclées par des policiers exposés sous un soleil dardant ; à peine s’ils comprenaient pourquoi leurs supérieurs les ont mis dans ce rôle. Juste pour une banale affaire de protestation contre la gestion de la cherté ?
Le subterfuge a été annoncé 48 heures avant la marche par un préfet dans le rôle d’instrument d’une manipulation plutôt que dans celui d’un adepte convaincu de la répression de marcheurs. Alain Orounla dans un puéril numéro de lanceur d’alerte se plaignant laconiquement d’une prétendue absence d’autorisation de la marche qui relève de son ressort si cela était nécessaire. alors qu’il était saisi des intentions des syndicalistes 2 semaines plus tôt. Il lui revenait tout bonnement de notifier officiellement aux organisateurs qu’il consent ou pas. Au lieu de prêter flanc à cette hideuse salissure sur un pays en manque de repères. Des apatrides recrutés pour noircir la destination Bénin n’auraient pas fait mieux.
Pourtant le sujet en débat est d’une grande utilité pour tout le monde : la vie chère. Jamais les denrées les plus élémentaires n’ont atteint les prix constatés aujourd’hui. Le kg de maïs qui tutoie les 500 f CFA, le haricot à 700 FCFA le kg ou l’huile végétale à 1600 le litre. De quoi faire de l’unique repas quotidien un luxe inaccessible à tous. Auparavant, c’est en ces moments durs que le gouvernement entre en action ne serait-ce que pour juguler les spéculations grâce aux réserves de l’Office national de sécurité alimentaire Onasa.
Mais, les milliardaires au pouvoir avaient chanté le requiem de l’arsenal social au profit des plus vulnérables. Les boutiques témoins de l’Onasa relèvent du passé oublié. Les fonds qui servaient à stocker des céréales ont permis d’ériger des statues de cartes postales autour de l’aéroport et de la présidence de la République. Dorénavant chaque citoyen Béninois se débrouille face à la rareté des produits, aux spéculateurs et autres trafics. Plus de responsabilité du pouvoir vis-à-vis de la faim installée au domicile de chaque travailleur. Pas question en revanche de troubler la quiétude des milliardaires en tolérant dans les rues de Cotonou une procession de pauvres hères faméliques à l’actif de la galère absolue.
A l’issue de la folle journée du 27 avril 2024, un bilan s’impose. Qui a gagné quoi finalement ? Le préfet ? La police ? Le gouvernement ou les affamés ? À propos du préfet, l’entourloupe s’est vite révélée au fil des événements de la fameuse journée. C’était bel et bien le Directeur général de la police qui était à la manœuvre sur le terrain. Ensuite les interpellés se sont retrouvés à Agblangandan hors du département du littoral. Ce n’était donc pas une affaire de préfecture mais de la plus haute hiérarchie sécuritaire. Les travailleurs et les populations n’ont pu exprimer leur faim pendant tout le pays s’en tire avec une posture d’intolérance et d’arbitraire.
C’est aussi cela, le Bénin révélé en 2016.