Le désormais ex-premier ministre de la transition a vertement critiqué, dimanche, ses partenaires de la junte qui « gouverneraient seuls ». Il a été déchargé de ses fonctions et remplacé par le général Abdoulaye Maïga.
Choguel K. Maïga se sentait-il de plus en plus ostracisé au sein du gouvernement de la transition ? Le président du parti M5 a vertement critiqué le week-end dernier ses partenaires de la transition sur plusieurs sujets dont celui de la durée de la transition. Selon Choguel Maïga, qui reproche aux militaires de gouverner de plus en plus seuls, il n’est pas normal que ce soit dans les médias qu’il découvre que la durée de la transition a été prolongée.
Épilogue d’un long divorce
Seul civil d’un gouvernement dominé par des militaires, Choguel Maïga était en quelque sorte la caution civile de la junte militaire présidée par le désormais général Assimi Goïta.
Tous les observateurs de la vie politique malienne s’attendaient à ce limogeage qui marque un tournant dans une transition déjà fragilisée. La junte militaire, aux commandes du pays depuis 2020, met ainsi fin à une cohabitation marquée par des tensions croissantes et des critiques publiques du désormais ex-chef du gouvernement contre les militaires au pouvoir. « Le Premier ministre d’un pays ne peut pas apprendre dans les médias que les élections ont été reportées. C’est à la télé que les ministres ont appris que les élections avaient été reportées », avait-il notamment déploré.
Nommé en 2021 après le second coup d’État de la junte, Choguel Maïga, âgé de 66 ans, formé en télécommunications en Union soviétique dans les années 1970, avait été choisi pour apporter une caution civile à un régime militaire cherchant à légitimer sa rupture avec la France et son rapprochement avec la Russie. Ancien ministre à plusieurs reprises et trois fois candidat à la présidentielle (2002, 2013 et 2018), il était une figure de proue du Mouvement du 5-Juin/Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), une coalition hétérogène qui a catalysé la contestation contre l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta, renversé lors d’un premier coup d’État en août 2020.
Choguel Kokalla Maïga s’était imposé comme une figure marquante de la transition malienne en dénonçant, dès 2021 aux Nations Unies, l’« abandon en plein vol » par la France, après l’annonce du retrait de la force Barkhane. Ce discours, emblématique du pivot stratégique vers la Russie et du recours au groupe paramilitaire Wagner, avait renforcé son poids symbolique. Cependant, son influence n’a cessé de s’éroder face aux militaires. Ses critiques récentes contre le maintien prolongé de la junte au pouvoir, son approbation en juin d’un texte s’opposant à cette prolongation et les condamnations judiciaires de ses proches ont accentué son isolement. Le Premier ministre, jadis figure de proue du régime, est devenu une cible de choix, ses positions divergentes venant heurter les ambitions des militaires au pouvoir.