L’éditorial d’Arimi Choubadé
Des siècles de déportation des bras valides vers le nouveau monde ; le Dahomey a survécu à cela. L’envahisseur s’est fait plus perfide en proclamant vouloir civiliser nos pères. Un autre siècle d’horreur, de souffrance, d’humiliation, d’aliénation et de travaux forcés, pour finir par une décolonisation dolosive. Le Dahomey, stoïque a même retrouvé une certaine fierté à travers Bio Guerra, Béhanzin, Kaba. Puis nous-mêmes néo-colons avions rajouté les indépendances factices, les coups d’État, la dictature marxiste-léniniste, la françafrique etc. À tout cela le Dahomey, devenu Bénin a survécu.
C’est vrai qu’aujourd’hui le territoire national est comme pris dans un étau effroyable. Les routes allant vers le Togo sont coupées par toute sorte d’obstacles (tranchées creuset, blocs de pierres infranchissables, traque policière et douanière implacable). C’est la guerre contre les paysans qui essaient de trouver meilleur client à leurs récoltes de soja dans le pays voisin. La frontière vers le Niger est quant à elle hermétiquement fermée parait-il afin de se conformer aux sanctions de la CEDEAO et de l’Uemoa. Le côté Burkina Faso était dans un état comateux depuis bien longtemps où les passagers sont régulièrement terrorisés par les groupes armés ayant élus domicile tout au long des 22 km de no man’s Land entre les deux postes frontaliers. Je préfère ne pas parler des relations troubles aux frontières avec le Nigeria ponctuées d’alliance, de mésalliance, de trafics en tout genre. Visiblement il n’y a que l’océan Atlantique qui soit la seule frontière paisible du Bénin si on écarte la menace des pirates aux larges des côtes.
Comment survivre au milieu de tout cet imbroglio où seules la ruse et la rage d’État parviennent à se frayer leur chemin depuis l’avènement de la rupture en 2016 ? Les plus pessimistes pourraient être tentés de penser que le trou se fait si abyssal que jamais la terre de Guézo et de Toffa ne pourrait s’en remettre. Pendant que tout semble si sombre et que les mauvaises perspectives s’amoncellent à l’horizon, il n’y a qu’une seule chose à dire : les peuples ne meurent jamais.
C’est désespérant certes de voir en prison une dame qui a beaucoup apporté à l’autonomisation des femmes en Afrique condamnée et emprisonnée pour terroriste. C’est encore plus désespérant le spectacle de la fine fleur du droit constitutionnel sur le continent derrière les barreaux pour, prétend-on, « blanchiment d’argent ». Tous les deux arrêtés en pleine circulation pendant que des dealers sont tranquilles chez. À tous ceux-là on a envie dire encore une fois que le Bénin ne mourra pas. Il faut plus que ces brimades pour briser des Joël Aĩvo et Réckya Madougou. Ils survivront certainement et susciteront probablement d’autres vocations.
Ce peuple a une âme dit-on…