Justice : Cinq autres citoyens pris dans l’engrenage des juges béninois

Les sieurs Les sieurs ALFA KAPIPO Bio Denis, ANAGONOU Nicaise, Samuel ADJAKLO, SEGLA Félicien et Honoré ADJAKLO viennent de passer soixante-huit mois en détention provisoire sans mandat de dépôt. La justice ignore royalement une décision de la cour constitutionnelle.

Par Bernadin ANATO


L’affaire remonte à 2018. Soupçonnés d’association de malfaiteurs et de tentative de vol, les sieurs Bio Denis ALFA KAPIPO, Nicaise ANAGONOU, Samuel ADJAKLO, SEGLA Félicien et Honoré ADJAKLO ont été appréhendés par la police et présentés au procureur de la république près le tribunal de d’Abomey-Calavi le 6 mars 2018. Le même jour, ils sont placés sous mandat de dépôt et incarcérés à la Prison Civile de Cotonou, suivant la procédure N° CALA / 2018 / PR /00616.

Détention illégale


Le 07 mai 2018, les prévenus furent présentés à un juge de la deuxième chambre des flagrants délits du tribunal de première instance de deuxième classe d’Abomey-Calavi. Ce dernier s’est déclaré incompétent pour juger l’affaire en l’état et renvoyé le ministère public à mieux se pouvoir.
Selon les dispositions du code de procédure pénale béninois, le procureur de la république dispose dès lors de 24h pour l’ouverture d’une information. Et puisque les mises en cause ne sont pas présentées libres, le tribunal devrait « confirmer le mandat de dépôt du procureur de la République pour 24h » conformément aux dispositions de l’article 483 du code de procédure pénale en ses alinéas 1 et 2.
Au bout de ce délai, les prévenus devraient, comme le prévoit la procédure, passer devant un juge d’instruction qui devrait, après une audience de cabinet, en présence de leurs avocats, les déférer devant le juge des libertés qui peut s’il y a lieu délivrer contre eux un nouveau mandat de dépôt ou les remettre en liberté pendant que l’instruction suit son cours.

Dans le cas de ces cinq personnes, ce n’est que le 07 juin 2018, soit un mois après le délai légal, qu’elles ont pu voir le juge d’instruction pour l’interrogatoire de première comparution. Il les a retournés en détention, sans passer par la case Juge des Libertés et de la Détention, en violation flagrante de la loi.


Abus de pouvoir


Sur quelle base légale Bio Denis ALFA KAPIPO, Nicaise ANAGONOU, Samuel ADJAKLO, SEGLA Félicien et Honoré ADJAKLO, sont-ils donc maintenus en détention, alors que le mandat de dépôt du procureur est caduc depuis le 7 mai 2018 ? Une question à laquelle seul peut répondre le ministre de la justice, puisque même la chambre des libertés et de la détention de la cour d’appel de Cotonou a laissé sans réponse les deux lettres par lesquelles, les détenus l’ont saisie.

Sans mandat de dépôt, les prévenus auraient dû recouvrer leur liberté depuis fort longtemps. Car, le code de procédure pénale en son article 147 stipule que dans ces cas, c’est la chambre des libertés qui se prononce et met les prévenus en liberté d’office. En résumé, les sieurs Bio Denis ALFA KAPIPO, Nicaise ANAGONOU, Samuel ADJAKLO, SEGLA Félicien et ADJAKLO Honoré sont en train de passer soixante-huit mois en détention provisoire sans mandat de dépôt du juge des libertés et de la détention.


La fausse ordonnance de prolongation de détention provisoire


Toutes les tentatives pour voir clair dans le dossier sont restées vaines. Informé des requêtes de ses victimes qui réclament justice, et probablement conscient de la gravité des actes, le tribunal de Calavi a, semble-t-il, tenté de se rattraper en émettant après coup, une ordonnance de prorogation de mesures provisoires de détention. Un acte que les prévenus qualifient de « pur cynisme » et de « faux » puisque le document est daté 06 juin 2018, soit la veille de leur première comparution devant le juge d’instruction.
De plus, l’ordonnance contestée aurait été notifiée aux intéressés le 04 décembre 2018 sans que les concernés n’aient pu en recevoir copie, conformément à la loi. Les détenus affirment que le greffier de l’époque avait catégoriquement refusé de leur en fournir un exemplaire.

Condamnation de la Cour Constitutionnelle

Une question se pose alors qu’est-ce qui justifie cette confusion dans la procédure ? Le tribunal d’Abomey-Calavi serait-il sous l’influence d’une main invisible qui aurait intérêt à ce que les prévenus restent en détention, ou l’embrouille dans la procédure ne serait-elle que le résultat de l’incompétence ou de la désinvolture des juges ?
Toujours est-il que le 23 Février 2023, par décision N° DCC 23 – 040 la cour constitutionnelle avait qualifié d’arbitraire la détention des cinq mis en cause et ordonné leur libération. Une décision qui a permis aux détenus de saisir la chambre des libertés et de la détention de la cour d’appel de Cotonou d’une nouvelle requête aux fins de leur mise en liberté d’office. Le parquet général près la cour d’appel de Cotonou a régulièrement transmis au Procureur de la République près le tribunal d’Abomey Calavi le soit transmis RF : N° 885 / PG – CA / Cot aux fins de communication des dossiers des intéressés. Selon nos informations, les dossiers des sieurs Bio Denis ALFA KAPIPO, Nicaise ANAGONOU, Samuel ADJAKLO, SEGLA Félicien, et ADJAKLO Honoré n’ont toujours pas été transféré à la cour d’appel de Cotonou.

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