Une décennie après l’interdiction de l’excision en Gambie, cette pratique ancestrale controversée est sur le point de refaire surface légalement. Le pays envisage en effet sa réintroduction dans les textes de la République. Depuis le lundi 18 mars, les députés gambiens examinent une proposition de loi qui pourrait annuler les progrès réalisés dans la lutte contre les mutilations génitales féminines (MGF). Cette perspective a suscité une vive émotion parmi les défenseurs des droits humains et a ravivé les tensions entre les traditions et les droits des femmes.
Un pas en arrière pour les droits des femmes ?
Pour de nombreux militants et organisations de défense des droits des femmes, le projet de loi représente une menace sérieuse aux avancées dans la lutte contre les MGF. Jaha Dukureh, une activiste renommée dans ce combat, exprime son désarroi face à cette éventualité, voyant dans le renvoi du projet de loi en commission.
Fatou Baldeh, à la tête d’une ONG féminine en Gambie, rappelle que l’interdiction n’a pas éradiqué la pratique des MGF, qui continuent ouvertement dans certaines communautés. L’abrogation de la loi actuelle pourrait donc exacerber une situation déjà préoccupante, en légitimant et en encourageant davantage ces pratiques nocives selon elle.
Michele Eken, chercheuse à Amnesty International, met en garde contre les conséquences désastreuses d’une telle loi pour les droits des femmes en Gambie et dans la région. Pour elle, il faut protester et « s’assurer que nous ne prenons pas, que nous n’enlevons pas quelque chose pour lequel il a fallu tant de temps pour se battre ».
La proposition de loi est soutenue par certains comme un moyen de préserver la loyauté religieuse et les valeurs culturelles. Almameh Gibba, le député, initiateur du projet, et ses partisans voient dans cette loi un moyen de sauvegarder l’identité culturelle gambienne, tandis que ses opposants y voient une violation des droits humains fondamentaux. La proposition a été renvoyée à une commission parlementaire pour un examen plus détaillé.