20 septembre 2024

Bénin/Sécurité : la grande purge ?

À deux ans d’un tournant décisif pour sa succession, Patrice Talon veut-il garder la main sur un des piliers de son pouvoir ? Le public béninois a appris cette semaine la mise à la retraite anticipée de plusieurs centaines de fonctionnaires de police et des douanes.

C’est par message RADIO-TELEPHONE-PORTE que le Directeur Général de la Police Républicaine, Soumaïla Yaya, a rendu publique la liste des 315 fonctionnaires concernés par la mesure de mise à la retraite forcée.

Dans un article publié sur son site internet le même jour, le journal Le Potentiel explique que c’est en vertu de la loi 2020-16 du 03 juillet 2020 que les autorités ont pris cette mesure. Selon l’article 167 de ladite loi, en dehors des limites d’âge fixées, « tout fonctionnaire de police peut exceptionnellement être mis à la retraite d’office après vingt années de service ». Selon nos informations, ce n’est même pas le cas pour tous les agents mis à la retraite. Par exemple, le numéro 21 sur la liste, le commissaire principal Baudelaire SEGOH n’aurait été recruté qu’en 2005. Ce qui lui ferait 19 de carrière cette année. C’est pire pour le commissaire de police de première classe Kohovi Amédée Yves ADJOVI, le n°39 sur la liste. Recruté en 2007, il ne totaliserait que 17 ans de service. On remarque également des noms conus tels que celui du contrôleur général de police Louis Philipe Houndégnon, ancien et célèbre patron de la Police sous le président Yayi. Il était chargé de toutes les enquêtes policières concernant l’homme d’affaires Patrice Talon. Il y a également l’ex-directeur de l’Émigration et de l’Immigration, Florent Edgard Agbo, condamné à 10 ans de prison dans une affaire de délivrance de faux passeports.

Arbitraire

Les mêmes mesures ont été annonces à la direction générale des douanes et droits indirects où trente (30) fonctionnaires ont été poussés vers la porte, sur la base du nouveau statut spécial des fonctionnaires des douanes. Une loi calquée sur celle des fonctionnaires de police et qui autorise le gouvernement à mettre un terme à la carrière de ces catégories de fonctionnaires sans raison apparente.

Bien qu’elles discriminent clairement les hommes et femmes en arme, comparativement aux autres agents de l’État, ces lois votées par la huitième législature avaient obtenu l’onction de la cour Djogbénou comme étant conformes à la constitution. « J’ai encore 8 ans de carrière devant moi. Voilà qu’ils ont décidé de les sacrifiés et préfèrent laisser nos collègues qui devraient normalement aller à la retraite cette année, en 2025, 2026 et 2027 », se désole ce policier qui entrera dans sa retraite dès le 1er février 2024, malgré lui. « Ces lois sont une véritable épée de Damoclès au-dessus de la tête des policiers, militaires ou douaniers, commente un observateur. Elle permet au pouvoir de s’assurer la loyauté et la docilité des agents ».

Interrogations

On en sait encore très peu sur les raisons de ces mesures et encore moins sur les critères qui ont présidé au choix des fonctionnaires à mettre à la retraite. La loi n’oblige pas les autorités à les fournir. Mais la liste des agents concernés par cette mesure soulève quelques interrogations. À la police Républicaine par exemple, ce sont essentiellement des agents issus de l’ex-police nationale qui sont touchés par la mesure. Huit (8) nouveaux retraités sur dix (10). Et quand on sait la qualité des rapports du DG Soumaïla Yaya (ex-gendarme) avec ses collègues issus de l’ex-police nationale, l’on ne peut s’empêcher de se demander si le DGPR n’a pas cédé à la tentation de se débarrasser d’eux. D’autant plus, indique une source interne, qu’il s’agit surtout d’agents « peu coopératifs sur lesquels le DG Yaya ne peut pas compter pour exécuter certaines missions en marge de la légalité ». C’est le cas par exemple de l’ancien DGPN Louis Phillipe Houndégnon qui ne s’est jamais privé de contester certaines décisions du DG Soumaïla Yaya. La plupart de ses lieutenants ont également été poussés vers la sortie.

S’agit-il d’une purge ? Certains observateurs inscrivent ces départs forcés dans le cadre d’une vaste manœuvre de reprise en main des forces de défense et de sécurité en vue. « Si j’ai comme projet de conserver le pouvoir par des moyens non démocratiques, je m’assure d’avoir tout l’appareil répressif sous mon contrôle », analyse un ancien militaire.
Des mesures similaires de mise à la retraite anticipée dans les rangs des forces armées béninoises ne sont pas à exclure.

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