Le président Français Emmanuel Macron voulait « une clarification », les Français lui ont donné une assemblée nationale plus fragmentée que la précédente.
Par Damien Koffi Konan
Le ciel politique français est plus orageux que jamais. La clarification que voulait le président français au soir des européennes du 9 juin où l’extrême droite est arrivée largement en tête (35%) a plutôt débouché sur une situation de blocage jamais connue dans la 5e République. Contre toute attente, la Gauche réunie au sein du Nouveau Front Populaire (NFP) est arrivée en tête de cette élection avec 180 sièges (en progression de 49 par rapport à 2022), loin devant le Rassemblement National que les sondages donnaient pourtant largement vainqueur. Le parti de Marine Le Pen arrive finalement en troisième position avec 143 députés (57 de plus qu’en 2022).
Blocage
Si la liste Ensemble pour la République, la liste de la majorité présidentielle (LERM, Horizon, UDI, Modem) sort affaiblie de cette élection avec 82 sièges en moins que dans l’assemblée sortante, le groupe du président Macro garde cependant une grande marge de manœuvre pour conserver le pouvoir. Surtout que la coalition de gauche se déchire autour du nom du premier ministre. « Tout le programme, rien que le programme », avait prévenu Jean-Luc Mélanchon, le leader charismatique de La France Insoumise quelques minutes après l’annonce des premiers résultats. LFI (71 sièges) rejette ainsi tout compromis autour du programme et partant, toute idée de coalition avec les macronistes ou avec la droite (47 sièges) qui signifierait la fin des promesses faites aux électeurs : abrogation de la réforme des retraites, blocage des prix des produits de première nécessité, hausse de 15% du Smic, etc.
« Personne ne l’a emporté »
Ce n’est pas inscrit dans la constitution, mais la tradition républicaine veut que même au cas où aucune liste n’a obtenu la majorité absolue (289), il revienne à la liste ayant obtenu le plus de sièges, de former un gouvernement. C’est ce qui s’est passé en 2022 avec le macronistes qui ne l’avaient gagné qu’avec une majorité relative de 245 sièges. C’est qu’aurait dû faire Emmanuel Macron, selon l’ancien Premier Ministre Dominique de Villepin, c’est évidemment ce que réclament à tue-tête tous les militants de gauche. Des revendications auxquelles reste sourd le président français, bien aidé, il faut le dire, les divisions au sein du NFP. Dans un courrier adressé aux français le 11 juillet depuis l’avion qui le transportait vers Washington où se tenait le sommet de l’Otan, Emmanuel Macron a fait le constat selon lequel « personne ne l’a emporté ». Emmanuel Macron invite ses concitoyens à « inventer une nouvelle culture politique », conscient de ce que son idée de vouloir attendre l’élection du bureau de l’Assemblée Nationale avant de nommer le premier ministre est en opposition aux usages républicains.
Dans les rangs de l’opposition de gauche, les jurons fusent. « Emmauel Macron tente d’effacer le résultat de l’élection et de nier le suffrage universel. Il n’aime pas la démocratie », s’est indignée Mathilde Panot, la présidente sortante du groupe LFI. De fait, ce sont le RN et LFI que le président Macron appelle à exclure d’une éventuelle coalition dite républicaine dans le cadre de la formation d’une majorité. Le groupe des députés centristes est en effet capable de gagner l’élection pour la présidence de l’assemblée nationale par une majorité relative au troisième tour avec les voix des partis de droite si les deux autres tendances du podium final maintiennent leurs positions radicales. Cela permettra au camp macroniste de se maintenir au pouvoir. Autrement dit, une élection pour rien.