La proposition de loi portant révision de la constitution déposée par un député de la mouvance, la semaine écoulée, a du plomb dans l’aile. Ce lundi 29 janvier 2024, un avocat béninois appartenant à un cabinet de renom a introduit un recours devant le juge constitutionnel. Dans sa requête, il démontre l’impertinence de la proposition de loi du député Assan Séibou et demande à la cour de le reconnaître coupable de viol de la constitution.
La requête est portée par Maître Ayodélé Ahounou, avocat au barreau du Bénin et membre du Cabinet A2 Investment Law Firm (A2LF). Dans un document long de plusieurs pages, il attaque la proposition de loi introduite à l’Assemblée Nationale par un député qu’il accuse de vouloir travestir une décision de la haute juridiction. Dans sa Décision DCC 24-001 du 04 janvier 2024, la Cour Constitutionnelle avait relevé quelques lacunes dans le Code électoral qui sont susceptibles de compromettre l’équité dans l’élection présidentielle de 2026. Ces lacunes concernent notamment la question des parrainages des députés et des maires (actuels comme ceux qui seront élus en 2026). C’est alors que la cour avait exigé au Parlement de retoucher le code électoral afin de corriger ces disparités.
Le requérant Ayodélé Ahounou est donc surpris de voir le député se baser sur la décision de la Cour pour introduire une proposition de loi portant révision de la constitution alors que la Cour avait plutôt parlé de révision du Code électoral. Il rappelle d’ailleurs l’article 3 de la Décision DCC 24-001 du 24 janvier 2024 qui « dit que l’Assemblée Nationale est invitée à modifier le code électoral pour, d’une part, rétablir l’égalité du pouvoir de parrainer à l’égard de tous les maires et, d’autre part, rendre conformes à l’article 49 de la Constitution, les dispositions de l’article 142, alinéa 6 de la loi n°2019-43 du 15 novembre 2019 portant code électoral ».
L’avocat béninois a donc décidé d’attirer l’attention du juge constitutionnel sur le fait que, « en lieu et place d’une proposition de loi tendant à la révision du Code ainsi que la Cour constitutionnelle l’a exigé, et de la prise en compte des injonctions de ladite Cour opérant dans l’exercice de son pouvoir constitutionnel de régulation, c’est plutôt une prétendue proposition de loi visant la révision de la Constitution elle-même que le député auteur du texte en cause a cru devoir introduire à l’Assemblée Nationale ». Ce qui est un manquement grave à la décision rendue par la haute juridiction et qui a le caractère de la chose jugée. Avec méthode, l’auteur du recours a démonté point par point, avec plusieurs décisions de jurisprudence à l’appui, la proposition de loi introduite par le député président du groupe parlementaire Bloc Républicain.
Pour empêcher le parlementaire de se servir d’une décision de la cour pour tripatouiller la loi fondamentale, Maître Ayodélé Ahounou appelle la juridiction à empêcher l’examen de cette proposition de loi en déclarant que le député Assan Seibou « a violé l’autorité de la chose jugée et la force exécutoire des décisions de la Cour constitutionnelle consacrées à l’article 124 de la Constitution ». Aussi, demande-t-il à la Cour, de « dire et juger subséquemment que la proposition de loi en cause est intervenue en violation de la Constitution » puis « dire et juger subséquemment que l’auteur de ladite proposition a violé la Constitution ».
Retrouvez ci-dessous, l’intégralité du recours de l’avocat Ayodélé Ahounou retranscrit par Olofofo :