Éditorial de Arimi Choubadé
C’est le front anti-confiscation des élections qui laisse plus d’un Béninois pantois. Pourtant, les maux du processus démocratique au Bénin sont désormais de notoriété planétaire. 2019, 2020, 2021 : affrontements armés, tirs à balles réelles sur des contestataires, arrestations de candidats déclarés, condamnation et exil pour d’autres, bourrages d’urnes impunis voire résultats confisqués pour caducité avant proclamation (pour ceux qui y comprennent quelque chose), etc… Seules les législatives de janvier 2023 ont pu s’épargner les scènes de guerre entre forces armées régulières et guerriers adverses non encore identifiés juste parce que pour une fois depuis 2019 un parti critique vis-à-vis du régime Talon a participé à un scrutin.
Malgré ce tableau carrément lugubre, le parti Les Démocrates de Yayi et Ajavon Sébastien, leader d’un autre parti, l’Usl jamais agréé par le pouvoir ne semblent pas avoir les mêmes visions sur l’arnaque démocratique déplorée depuis bientôt 8 ans. En effet, Bien que lourdement condamné dès 2018 à 20 ans d’emprisonnement dans une obscure affaire de trafic de drogue que l’on croyait définitivement jugée en faveur du prévenu, Sébastien Ajavon a obtenu des décisions très intéressantes de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples sur le processus électoral au Bénin. Il s’agissait d’une sorte d’invalidation de la réforme aux forceps du code électoral intervenue en 2018 avec effet immédiat du retour au texte consensuel de 2014 approuvé par toute la classe politique en son temps. Ce qui entraîne la non reconnaissance des législatives de 2019 et de toutes les autres qui vont suivre sur la base de cette réforme.
La question est de savoir pourquoi Les Démocrates refusent obstinément d’intégrer ces décisions de la CADHP. Puis Yayi de réclamer un audit de la liste électorale alors que le sujet était déjà vidé par le code de 2014 qui avait institué une sorte d’audit annuel par un organe paritaire mouvance-opposition dénommé Comité D’orientation et de Supervision de la Liste Électorale Permanente Informatisée (Cos/Lepi). Ensuite, le même président de LD en appelle à la communauté internationale pour pacifier les processus électoraux à venir notamment les élections générales de 2026 qui prévoient la tenue dans la même année des législatives, municipales et présidentielles. La CADHP n’est-elle pas une structure de la communauté internationale ?
Bien évidemment le code de 2014 est loin d’être tiré des dix commandements du Prophète Moīse et qu’il y a lieu de le perfectionner. Notamment en ce qui concerne la confusion artistique entretenue par le législateur entre affichage et publication des résultats. Un anachronisme décapant continue d’ériger la Cena en propriétaire exclusif des résultats des bureaux de vote alors que partout ailleurs même le dépouillement se fait en direct dans les médias à plus forte raison les résultats sortis des urnes bien avant les proclamations officielles. Sans oublier la faiblesse des partis à couvrir l’intégralité du territoire par des représentants. Une autre aberration lorsqu’on sait que la Cena a largement les moyens de prendre en compte ces représentants déjà pour leur formation et et leur prise en charge le jour du scrutin dans un souci de garantir pour tous une égalité et une transparence avérées.
Peut-être s’agit-il d’une nouvelle guerre des partis : agréés contre non agréés…