Bénin/Politique : les contre-vérités de Patrice sur Yayi et sur le népotisme

Malgré les dénégations du président Talon, les exemples sont nombreux de la promotion des membres de sa famille et de ses amis. Les preuves de son activisme aussi pour obtenir le pardon de Boni Yayi.

Patrice Talon avait besoin de parler. Il lit les réseaux sociaux, écoute les commentaires qui se font sur lui, sur son attitude, et il brûlait d’envie de répondre à tout le monde. Mais il avait également besoin de régler ses comptes avec tous ceux qui le donnent pour fini politiquement et voudraient l’enterrer avant sa mort politique. Mais s’il ne fallait retenir qu’un défaut pour le chef de l’État béninois, ce serait sans doute sa mémoire oublieuse. A moins de faire exprès, le Président Patrice Talon s’est bien souvent illustré par les contradictions des déclarations qu’il fait et par l’assurance qu’il semble avoir que personne ne se souviendrait de ce qu’il avait dit précédemment sur le même sujet. Peut-être même que ça lui est bien égal. « Les conséquences de l’hubris » commente un spécialiste de la communication politique. Toujours est-il que sa sortie du 23 décembre était truffée de contre-vérités. Olofofo en a relevé quelques-unes.

Le népotisme

Évoquant l’éventualité d’une candidature de « son ami » Olivier Boko, le chef de l’État béninois a assuré qu’il n’avait pas pour habitude de promouvoir ses amis, ses parents et ses proches. Pourtant le régime à la tête duquel il se trouve est rempli d’exemples contradictoires. À commencer par Olivier Boko en personne. L’homme d’affaires dont il revendique l’amitié depuis plus de 20 ans est devenu le deuxième personnage le plus important de son régime. C’est justement ce statut qui lui a donné l’envie de grimper dans l’organigramme en s’installant carrément dans le fauteuil présidentiel. A olivier Boko, il faut ajouter Johannes Dagnon. Expert-comptable de profession, le patron du Bureau d’Analyse et d’Investigation (BAI) de la présidence de la république est le cousin du Chef de l’État. La structure qu’il dirige est considérée comme le ministère fantôme de l’économie, ou celui du plan. Il y a aussi l’ancien journaliste de RFI Boniface Vignon. Comme Johannes Dagnon, il est un cousin du Chef de l’État. Il a été nommé ambassadeur au Brésil peu de temps après l’investiture de Patrice Talon. Eustache Kotigan : lui-même expert-comptable de métier, ce très proche de Johannes Dagnon et de Patrice Talon a été nommé à la tête du conseil d’administration de la caisse de sécurité sociale peu de temps après l’installation de Patrice Talon. Après avoir évincé son rival Sébastien Ajavon, Patrice Talon a soutenu la candidature de monsieur Kotigan pour la présidence du patronat béninois. Il y a aussi Hervé Hêhomey, Benoît Dato et Mathieu Adjovi. Les deux premiers étaient ses employés à Benin Control. Ils ont tous les deux ont été nommés ministres. Quant au troisième, il a travaillé avec Patrice Talon dans le secteur du coton. Mathieu Adjovi est aujourd’hui juge à la cour constitutionnelle après avoir été fait député en 2019. Enfin, les cas Joseph Djogbénou, Sévérin Quenum et Rufino d’Almeida. Tous avocats de Patrice Talon, les deux premiers se sont succédé au ministère de la justice dans le gouvernement Talon, tandis que Rufino d’Almeida sera fait maire de Bohicon, la quatrième ville la plus importante du Bénin. Quant à Joseph Djogbénou, il sera bombardé président de la cour constitutionnelle pour y sécuriser la mise en œuvre des réformes politiques, puis imposé à la tête du plus grand des partis de la mouvance présidentielle, l’Union Progressiste le Renouveau.

La crise avec le Nigeria

Lors de l’interview du 23 décembre, le chef de l’état a été interrogé sur la nouvelle dynamique des relations bilatérales entre le Bénin et le Nigeria. Patrice Talon s’est réjoui de la normalisation des relations avec le grand voisin et profité pour lancer une nouvelle pique à ses adversaires : « Saviez-vous que si le Nigeria avait fermé ses frontières (en août 2019, ndlr) c’est à cause des intoxications de certains de nos compatriotes ? », a-t-il lancé dans une allusion à peine voilée à son prédécesseur Boni Yayi. Puis il ajoute « Le président Buhari me l’a avoué et m’a d’ailleurs exprimé ses regrets ». Une déclaration qui contraste avec celle qu’il avait faites le 7 novembre 2019 dans une interview accordée à RFI et France 24 : « Vous voyez les autorités nigérianes prendre une mesure aussi difficile pour l’économie des deux pays, juste parce que Yayi Boni aurait été convoqué par la justice de son pays ? », lançait-il presque indigné, au journaliste Christophe Boisbouvier, avant d’ajouter : « Ce serait insultant pour le nigérians de procéder ainsi ». Le pardon de Yayi BoniL’un des temps forts de cette interview, c’est la réplique que le président Talon avait réservée à tous ceux qui lui rappelaient depuis le 27 novembre dernier qu’il ne pouvait pas considérer le pardon en politique comme une faute, alors qu’il était lui-même le produit du pardon de son prédécesseur. « Moi je n’ai été pardonné de rien du tout » a rétorqué d’emblée le président béninois, se disant « amusé » par ceux qui prétendent le contraire. L’ancien exilé va plus loin en ajoutant que « C’est le président Yayi qui a souhaité qu’on fasse la paix. Je n’étais demandeur de rien du tout. D’ailleurs, les Justices béninoise et française m’ont relaxé. Alors je ne comprends pas qu’on fasse l’amalgame entre cette comédie et les faits graves pour lesquels des gens (Joël Aïvo et Réckya Madougou ndlr) ont été condamnés. »

Pourtant, interrogé par RFI le 29 octobre 2012 sur les mobiles de sa rencontre avec la nièce du chef de l’état béninois (personnage-clé de l’affaire de tentative d’empoisonnement sur la personne de Boni Yayi, ndlr) l’homme admettait avoir rencontré de nombreux collaborateurs du président Yayi pour essayer de se réconcilier avec le président béninois : « Vous savez, une telle relation entraîne des tentatives de conciliation et de réconciliation. Dites-vous aussi que je suis parfois demandeur, Parce que ce n’est pas facile de ne pas être bien dans son pays, avec le chef. On essaye par tous les moyens que les choses n’en restent pas là. » L’on sait également le rôle crucial qu’avait joué Réckya Madougou dans la réconciliation des deux hommes, « à la demande de Patrice Talon », insiste l’ex-garde des sceaux.

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