Moins de six mois après sa nomination, le ministre de l’Énergie, de l’Eau et des Mines a été évincé du gouvernement ce jeudi 26 juin 2025, suite à de lourdes accusations publiques contre son prédécesseur, Samou Séidou Adambi. Alors que tout le monde y voit une sanction, le porte-parole du gouvernement, Wilfried Léandre Houngbédji, récuse cette lecture. Une position qui suscite interrogations et met en lumière une certaine ambiguïté dans la gestion politique de cette affaire.
La polémique est née d’une déclaration inattendue de Paulin Akponna, le 21 juin dernier, lors d’une visite dans le quartier Titirou à Parakou. Face à la population locale, le ministre n’a pas mâché ses mots. Il a accusé son prédécesseur, Samou Séidou Adambi, d’avoir mal géré les ressources allouées à son ministère. « Je trouve véritablement triste de me retrouver dans un arrondissement de Parakou sans eau ni électricité, après autant d’investissement et de mobilisation de ressources par le gouvernement du Président Patrice Talon », avait-il déclaré.
Dans la foulée, les réactions se sont multipliées au sein de l’opinion publique. A l’hémicycle, les députés ne sont pas restés en marge. Le groupe parlementaire ‘’Les Démocrates” a déposé, pour son compte, une résolution pour ”la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire pour le contrôle de la gestion des ressources affectées à la fourniture d’eau et d’électricité aux populations de Parakou et environs”.
Face au tollé, la réaction du chef de l’État n’a pas tardé. Moins d’une semaine après les déclarations controversées, Patrice Talon a demandé et obtenu l’avis favorable du Parlement pour le limogeage de Paulin Akponna. C’est désormais José Didier Tonato qui assure l’intérim, cumulativement avec ses fonctions actuelles.
A la suite de ce décret, l’affaire a davantage secoué la sphère socio-politique nationale. Si beaucoup perçoivent cette décision comme une sanction, le porte-parole du gouvernement, Wilfried Léandre Houngbédji, l’analyse autrement. Selon les clarifications qu’il a apportées aux médias, le Président de République, Patrice Talon, n’a pas vu dans les propos de l’ex-ministre Akponna une simple querelle de leadership politique, mais plutôt une prise de position suffisamment grave pour rompre le devoir de réserve inhérent à la fonction ministérielle.
« Le Président considère que si les propos qu’il a tenus ne relèvent pas d’une logique de guerre de leadership politique, compte tenu de leur gravité, M. Akponna doit être délié de toute obligation de réserve ou de tout devoir de solidarité envers les membres du gouvernement pour apporter toutes informations utiles à la justice », a-t-il déclaré. Autrement dit, le limogeage ne serait pas une punition, mais un geste facilitateur qui consiste à libérer l’ex-ministre de ses obligations gouvernementales afin de lui permettre, en toute indépendance, de documenter ses accusations. Une position qui s’inscrit, selon Léandre Houngbédji, dans le cadre de la « tolérance zéro à la corruption » prônée par le chef de l’Etat.
Une désolidarisation politique immédiate
Cette lecture du porte-parole du gouvernement contraste fortement avec la réaction du Bloc Républicain, parti des deux anciens ministres Adambi et Akponna. Parallèlement au limogeage du gouvernement, le Bloc Républicain dans un communiqué, s’est totalement désolidarisé de Paulin Akponna, dénonçant des propos qui « ne reflètent aucun esprit républicain, de solidarité ni d’unité ».
Le BR l’a même tenu seul responsable de ses déclarations et a rappelé qu’il ne parlait pas au nom du parti. Une réaction sèche, qui va bien au-delà de la prudence ou de la réserve, et qui donne à la mise à l’écart du ministre les allures d’un désaveu politique total.
Cependant dans les faits, l’argument de « non-sanction » avancé par Léandre Houngbédji entre en contradiction avec la sévérité de la réaction politique qui entoure ce limogeage. Si Paulin Akponna est « délié » pour parler librement, pourquoi son propre camp le marginalise-t-il aussi brutalement ?
Peut-être que la procédure judiciaire enclenchée permettra de vérifier ses allégations dans les prochains jours.
A suivre…