Un peu plus de 24 heures après leur retrait du procès opposant le Ministère public à Olivier BOKO et Oswald HOMEKY dans l’affaire supposée de tentative de coup d’État, les avocats de la défense ont décidé de rompre le silence. Suite au communiqué du procureur spécial de la CRIET, ils ont officiellement réagi, ce mercredi 22 janvier 2025, en apportant leur version des faits, une réponse qui soulève de nouvelles irrégularités, prouvant que le Ministère public est prêt à tout pour obtenir gain de cause.
Dans un communiqué de deux pages, les avocats de la défense sont revenus sur les manœuvres en cours dans cette affaire qui captive l’attention de l’opinion publique. Leurs analyses soulèvent des questions cruciales sur les principes fondamentaux de la justice au Bénin. Les défenseurs de BOKO, HOMEKY et trois autres accusés ont d’abord rappelé les faits marquants de l’audience du 21 janvier, qui les ont contraints à se déconstituer de la défense.
En effet, l’irrégularité majeure soulevée par la défense concerne la composition de la chambre de jugement. « La chambre de jugement ne comptait en effet que trois (3) juges, au lieu de cinq (5), en contradiction avec les dispositions pertinentes de l’article 19 de la loi n°2018-13 du 02 juillet 2018 et de l’article 254 du Code de procédure pénale, qui exigent la présence d’un Président et de quatre assesseurs dans les affaires criminelles », explique le communiqué des avocats.
Après avoir mis en évidence cette irrégularité, la défense a également exprimé des doutes sur l’impartialité de la juge-présidente, Madame Christelle ADONON, ce qui a conduit à une dénonciation formelle des vices affectant l’ensemble du procès.
Une tentative de désinformation du procureur spécial
Le lendemain de cette audience, le Procureur spécial, dans un communiqué, a qualifié la décision des avocats de manœuvres dilatoires et de chantage, une tentative, selon la défense, de discréditer leurs réactions. Cependant, les avocats ont réagi fermement à cette attaque : « Nous appelons l’attention de l’opinion publique sur le passage de l’article 6 de la loi n°2020-07, prétendument cité par le Procureur spécial, qui, contre toute honnêteté intellectuelle, a cru devoir tronquer l’alinéa et supprimer les trois premiers mots du texte dans un but de désinformation. »
L’alinéa complet de cet article, précisant que « la Chambre de jugement siège en formation collégiale composée d’un (1) juge-président et de deux (02) juges assesseurs en audience ordinaire », a été utilisé de manière erronée par le Procureur pour justifier la composition de la chambre. Les avocats insistent sur le fait que le procès ne se déroule pas en « audience ordinaire », mais dans le cadre d’une session criminelle spécialement convoquée, ce qui impose une autre configuration de la chambre.
Au-delà des questions de procédure, les avocats ont également dénoncé les conditions de détention des accusés, qu’ils qualifient de « traitement inhumain et dégradant », en raison d’un isolement total 24h/24 qui s’apparente à de la torture. Ce traitement, combiné à de multiples irrégularités procédurales, constitue, selon eux, une violation flagrante des droits des accusés.
« L’absence de traçabilité de certains actes, en raison du non-établissement de procès-verbaux ; le rejet arbitraire des nullités et des demandes de mesures d’instruction ; l’émergence d’un arrêt mystérieux et suspect mettant à la charge des accusés une infraction de “participation à une entreprise terroriste” pourtant non contenue dans les chefs de poursuite ; des restrictions illégales à l’accès à la défense effective ; des violations des droits de visite et de communication pour les avocats ; et une amende civile infligée à un avocat pour avoir dénoncé le parti pris manifeste des juges » sont autant d’irrégularités que la défense pointe du doigt.
Dans ce contexte, les avocats réaffirment leur engagement en faveur de l’État de droit et de la justice transparente, concluant : « Nous réaffirmons avec force notre attachement à l’État de droit et à une justice transparente, respectueuse de la loi. »