Les procès menés par la Cour de Répression des Infractions Économiques et du Terrorisme (CRIET) sont critiqués depuis sa création pour leur non-respect des droits fondamentaux et de la procédure légale. Deux affaires récentes, celle de Steve Amoussou et celle de l’ex-bras droit de Patrice Talon, Olivier Boko, illustrent ces dérives judiciaires qui compromettent l’intégrité du système judiciaire béninois.
Par Julien Coovi
Le 9 décembre 2024, l’affaire Steve Amoussou, un dossier complexe et controversé, a fait objet d’une nouvelle audience à la CRIET. Cependant, ce qui aurait dû être une session normale de comparution a rapidement tourné en un affrontement juridique majeur lorsque la défense a introduit un recours en inconstitutionnalité devant la Cour constitutionnelle.
Les avocats de Steve Amoussou ont fait valoir que la procédure suivie par la CRIET violait les droits fondamentaux du prévenu, notamment en ce qui concerne la transparence du procès et l’accès aux éléments du dossier. Selon la défense, ce recours vise à garantir que le procès se déroule dans un cadre respectant pleinement les droits fondamentaux de la personne accusée.
Quelques jours plus tôt, ce sont les avocats d’Olivier Boko qui ont déposé un recours pour exception d’inconstitutionnalité. Dans cette affaire de présumée tentative de coup d’État, la défense a dénoncé de graves irrégularités dans le processus judiciaire. Me Ayodélé Ahounou, l’un des avocats des accusés, a exprimé son désarroi face aux violations multiples des procédures légales, notamment l’incohérence entre les dossiers remis à la défense et ceux examinés par les magistrats instructeurs. Selon lui, ces anomalies compromettent non seulement la défense de ses clients, mais aussi l’ensemble du processus judiciaire.
Comme dans ces deux affaires, d’autres dossiers à connotation politique ont donné lieu à des controverses, révélant des irrégularités dans le processus. Les procédures suivies par la CRIET dans ces affaires montrent un système judiciaire en crise. En refusant d’examiner sérieusement les exceptions soulevées par la défense dans le dossier de la présumée tentative de coup d’État, et en poursuivant des procès marqués par de graves irrégularités, la CRIET compromet la crédibilité du Bénin en matière de justice.
Selon Me Ayodélé Ahounou, cette persistance des magistrats à poursuivre l’audience malgré l’introduction d’une exception d’inconstitutionnalité remet en question l’impartialité des juges et leur volonté de rechercher la vérité.
Une justice politique ?
Les cas de Steve Amoussou et de Boko-Homeky ne sont pas des incidents isolés. Ils révèlent un problème structurel au sein de la CRIET, qui, selon de nombreuses voix de l’opposition et de la défense, est utilisée pour des règlements de comptes politiques plutôt que pour la recherche de la vérité. Le manque de transparence, l’absence d’accès équitable à l’information, et la gestion de dossiers sensibles de manière cavalière soulignent la dégradation des principes de la justice au Bénin.
La question qui se pose est la suivante : la CRIET agit-elle réellement en tant qu’organe judiciaire indépendant, ou est-elle un instrument de pouvoir au service du régime actuel ? Les recours en inconstitutionnalité soulevés par la défense et les critiques de l’impartialité des magistrats montrent une inquiétude croissante quant à la capacité de la justice béninoise à garantir un procès juste et équitable.