L’éditorial d’Arimi Choubadé
Pour rappel, l’audit de la liste électorale n’a rien à voir avec la crise politique autour du code électoral. Juste un caprice entre amis, Yayi et Talon, au cours de leurs bisbilles télévisées à l’occasion de l’audience accordée à une délégation du parti LD, au palais, en janvier 2024. A défaut de conclure à une “rencontre pour rien”, les deux personnalités restées “amies” malgré tout, ont dû trouver une entente factice, pour que les opposants commettent des experts afin d’auditer la liste. Le chef de l’État se promettait de mettre de l’argent à la disposition des auditeurs de la Liste Électorale Permanente Informatisée (LEPI). Jamais il n’a été question de négociation sur le sujet. Par contre, citoyens de tous bords, syndicats, confessions religieuses toutes tendances confondues et même chancelleries étrangères accréditées au Bénin n’ont de cesse d’œuvrer pour ce dialogue sans ruse et rage sur la crise du code électoral.
D’où la grosse interrogation sur la suite après l’audit. Supposons que la LEPI soit débarrassée de toute impureté à l’issue du processus. Elle sera tranquillement remise à la CENA et à la Cour constitutionnelle où les opposants n’ont aucun représentant, aucune prise, aucune marge de manœuvre. Sitôt la porte du dialogue de circonstance fermée, la ruse et la rage reprendront le dessus avec leur conscience soulagée par l’audit instrumentalisé. L’autre interrogation est de savoir si les opposants disposent de la garantie qu’ils seront admis à compétir lors des élections générales de 2026. Personne n’a oublié comment le scrutin leur avait été verrouillé au nez au profit des deux seuls PPP (Partis Politiques du Président) en 2019.
Pendant ce temps, le code meurtrier, malade et totalitaire ne s’offre aucun répit dans sa basse besogne de totalitarisme. Au contraire ! Non satisfait d’avoir provoqué des dizaines de morts civils par balles réelles depuis 2019 à nos jours, ce code continue d’égrener son maléfice sans limite. La dernière trouvaille est la mise en application de la suppression de la démocratie à la base, socle de l’édification d’un modèle de gouvernance incluant tous les fils du pays. Ainsi les chefs de quartier et de village élus sont en passe d’être remplacés sans élection par des responsables de parti, eux-mêmes dépourvus de toute légitimité populaire. En 8 ans de gouvernance, la rupture n’a jamais pu organiser le moindre scrutin local. Elle préfère établir une subornation de légitimité avec les élus municipaux pour faire désigner les responsables locaux à travers des partis dépourvus de tout vécu démocratique à l’interne. Comprenne qui pourra !
Depuis 2011, la classe politique avait fini avec les batailles de fichier électoral à l’occasion des scrutins. Mais l’avènement de Talon en 2016 a abouti à une déstructuration accélérée de tous les mécanismes du vivre-ensemble. Circonscrire le mal-être de la gouvernance à un audit du fichier électoral revient à masquer toute la chienlit institutionnelle en cours. L’exemple du Sénégal malgré ses macabres et sporadiques épisodes, montre à suffisance que tout dépend de la gestion des résultats sortis des urnes. Là-bas, le dépouillement dans les bureaux de vote se font en direct sur les médias et les réseaux sociaux. Au Bénin, c’est un crime de publier les résultats avant la Cena entièrement aux mains du régime. Rien que le fétichisme autour des résultats mérite des initiatives de dialogue sur le code afin d’aboutir à leur publication en temps réels pour ne pas dire instantanément. Comment conjurer les exclusions pendant qu’on a choisi d’exclure plusieurs questions de la seule opportunité de dialogue depuis 8 ans ?
La révision totale du code crisogène dont le fichier électoral ou l’audit du fichier électoral exclusivement ?