Le Code électoral récemment révisé au Bénin continue de faire débat. Lors d’une table ronde virtuelle organisée par le think tank « Ça fait débat sur Wathi », basé à Dakar au Sénégal, la question des réformes électorales et des perspectives politiques a alimenté des échanges vifs entre mouvance présidentielle, opposition et société civile. Un constat majeur a émergé de ce débat : « Ce sera difficile pour les partis politiques d’avoir le moindre député », ont souligné plusieurs intervenants, en référence aux nouvelles dispositions du Code électoral révisé en mars 2024.
L’intitulé de la discussion, « Réformes électorales et perspectives politiques au Bénin », a permis de poser les bases d’une analyse approfondie des réformes mises en œuvre sous la présidence de Patrice Talon, avec un focus particulier sur la complexité des nouvelles règles. Ces réformes ont non seulement modifié les conditions de candidature pour les élections présidentielles, mais aussi durci les critères pour l’obtention de sièges au Parlement. À quelques mois des élections prévues pour 2026, cette table ronde a permis de comprendre les enjeux et les répercussions de ces changements sur le paysage politique béninois.
Le code révisé impose des critères stricts pour la candidature à la présidence et à la vice-présidence : un parrainage d’au moins 15% des députés et des maires provenant des 3/5e des circonscriptions électorales législatives. En outre, un député ou un maire ne pourra parrainer un candidat d’un autre parti que dans des conditions très limitées, notamment en cas d’accord de gouvernance préélectorale.
Un code qui divise
L’une des mesures les plus controversées concerne le seuil de 20% des suffrages exprimés dans toutes les circonscriptions pour qu’un parti puisse obtenir des députés. Un critère jugé particulièrement exigeant, voire excluant, par une large partie des intervenants. Selon les discussions, ce seuil de 20% serait un « record mondial », car il limite considérablement la représentation des petites formations politiques.
Pour la mouvance présidentielle, cette réforme s’inscrit dans une volonté de rationaliser le paysage politique et de favoriser l’émergence de grands partis, réduisant ainsi la prolifération de formations politiques. Malick Gomina, député et représentant du camp présidentiel, a défendu cette position, expliquant que cette réduction du nombre de partis, passé de plus de 200 à une dizaine, vise à simplifier la gouvernance et à instaurer une stabilité politique.
L’opposition : Une démocratie fragilisée
L’opposition, représentée par Nathaniel Hinnougnon Kitti, l’un des vice-présidents du principal parti d’opposition « Les Démocrates », a vigoureusement contesté cette analyse. Il a souligné que ces réformes, loin de renforcer la démocratie, risquent d’étouffer la pluralité politique et d’aggraver les tensions sociales. Pour lui, les réformes de Talon ont érodé les fondements démocratiques du pays et exacerbé les clivages au sein de la société béninoise.
La société civile : Un appel à la réflexion
Le point de vue de l’opposition a été largement soutenu par deux voix issues de la société civile : Maryse Glèlè Ahanhanzo, coordinatrice nationale de Wanep-Bénin, et Expédit Ologou, président du du think tank béninois, Civic Academy for Africa’s future (CIAAF). À l’arrivée, plusieurs recommandations ont été faites sur des préoccupations majeures concernant l’impact de ces réformes sur la stabilité politique et la paix sociale du pays. L’une des principales recommandations de cette table ronde était une relecture urgente du code électoral, afin de garantir que les élections futures se déroulent dans un cadre plus inclusif et respectueux des aspirations du peuple béninois. Ceci pour éviter une crise politique grave, avec des conséquences pour la cohésion nationale et les libertés individuelles. Enfin, un appel a été lancé à tous les acteurs politiques pour qu’ils prennent en compte l’intérêt des populations et ouvrent un véritable dialogue sur les conditions des prochaines élections.