Pourquoi les sanctions contre le Niger devraient retomber sur le seul port de Cotonou plus que tous les autres potentiels ports réunis ?
Par Arimi Choubadé
C’est combien, une journée d’embargo sur le Niger pour le port de Cotonou supposé être le poumon de l’économie béninoise ? Des mois que cela dure. En d’autres termes, le poumon est privé de sa principale source d’oxygène. Qui paie la note ? Le trésor public béninois ? Peut-être qu’un jour apparaîtra un des mecs super intelligents de la rupture nous disant que l’opération aura été d’une grande réussite pour le pays révélé et que chaque heure de blocus à la frontière entre Malanville et Gaya génère d’énormes opportunités pour les Béninois. Qu’avant même de mettre le quai et le corridor en souffrance, chaque incidence a été négociée avec les pairs de la Cedeao. Que tous les risques ont été équitablement répartis entre tous y compris les réfractaires à l’aventure militaire. Et qu’à la libération de Bazoum, le mécanisme de péréquation serait à la charge des fautifs à savoir principalement l’État nigérien dont les militaires auraient commis l’indicible péché.
Les seuls échos perceptibles, pour le moment, sont ceux des damnés bloqués de part et d’autre du pont sur fleuve Niger relayés sur différents supports médiatico-électroniques. Chauffeurs et apprentis, divers négociants, passeurs de tous genres coincés dans un gigantesque campement improvisé sans aucune hygiène, vivotant au gré des aléas ; pas parce que des armes crépitent déjà, mais parce que la Cedeao aurait décidé d’intervenir militairement afin de libérer l’otage Bazoum aux mains des putschistes de Niamey, “par tous les moyens”. Soit ! Et pourquoi cela devrait retomber sur le seul port de Cotonou, débouché principal du Niger plus que tous les autres potentiels ports réunis.
S’il est encore permis de poser des questions dans ce pays, pourquoi ne pas chercher à savoir les raisons qui expliquent les larmes des responsables des parcs de véhicules d’occasion à Ekpè du fait de l’absence des clients nigériens. Sans avoir pris aucune part dans la fermeture brutale de la frontière avec le Niger les voilà sommés de payer des taxes du fait du non-respect des délais de transit des véhicules sans acheteurs sur leurs parcs depuis lors. Les négociants du gouvernement de la rupture n’ont-ils pas intégré les turpitudes de cette filière dans les tractations ? Je n’ose pas croire que tout s’est passé en quelques heures de débat entre certains chefs d’État de la Cedeao lors du sommet extraordinaire d’Abuja début août 2023. C’est vrai que l’honorable Issa Salifou a déjà révélé que le parlement de la Cedeao n’en a jamais débattu. Est-ce à dire que le Bénin s’est retrouvé ennemi N°1 de la junte de Niamey sans avoir tirer un seul coup de fusil en direction du Niger et sans avoir pu échanger sur tous les détails financiers découlant de ce fait?
Ce cher inventeur Valentin Agon, l’un des rares au Bénin nous a toujours enseigné qu’un poumon économique a besoin de rentrée et de sortie. Selon lui, donc, le port de Cotonou a plus besoin de sortie que de rentrée. Or sa voie de sortie par excellence demeure la destination Niger. Ce qui rentre renfloue certes les caisses de l’État mais contribue très peu à l’économie nationale puisqu’en définitive tout ce qui est payé au cordon douanier est récupéré aussitôt auprès du consommateur local. En clair, c’est l’argent collecté auprès des Béninois qui sert à payer les industries à l’extérieur, le transport jusqu’au port de Cotonou ainsi que le bénéfice du vendeur dont une partie peut être rapatriée à l’extérieur si le vendeur est un étranger. En résumé, l’argent qui sort du Bénin revient largement amputé. Par contre, tout ce qui part vers le Niger est tout bénéfice pour le Bénin qui troque son infrastructure portuaire et son corridor contre de l’espèce sonnante et trébuchante. C’est tout cela qui est sacrifié pour la Cedeao. Contre combien ?
Juste pour la réintégration de Bazoum ?